Le 28 novembre dernier, l’Association des conseils en gestion linguistique (ACGL) a organisé une discussion en deux volets sur la tarification pratiquée dans le secteur langagier au Canada.
Renato Beninatto, président et chef de la direction de Nimdzi, a ouvert le bal en mettant en question les pratiques actuelles, qui ne reflètent pas la valeur de la profession, alors qu’au Canada, nous avons le potentiel d’être les leaders mondiaux.
Antoine Raimbert, président de l’ACGL et du cabinet Cartier et Lelarge, a ensuite animé une table ronde en posant des questions délicates à François Chartrand (président et chef de la direction, Versacom), Donald Barabé (ancien vice-président aux Services professionnels, Bureau de la traduction), et Karine St-Onge (Directrice, Services linguistiques, CPA Canada), ainsi qu’à Renato Beninatto, qui ont apporté des réponses franches et constructives.

Cinq points sont ressortis de la présentation et du panel :

1. Soyons vendeurs!
M. Beninatto a fait ce dur constat : les professionnels du secteur langagier canadiens n’ont pas une once de marketing dans le sang! Nous vendons nos traductions à l’unité et avons peur d’augmenter nos tarifs, de négocier, alors que les autres industries n’hésitent pas. Pourtant, le travail requiert des compétences technologiques et langagières spécialisées. Alors, osons être plus « marketing » : ce que nous vendons, c’est une valeur ajoutée, une image de marque! Gardons en tête que les acheteurs de traduction (les « clients ») recherchent la ponctualité, la qualité des traductions et la qualité de notre service, avant même de regarder le coût.

2. Les temps changent : repensons la tarification!
Il ne faut pas avoir peur de facturer un montant qui reflète notre valeur, la qualité et la complexité de notre travail. Varions nos stratégies de vente selon le type de client et, surtout, selon leurs besoins. Pour cela, une communication efficace avec les clients est la clé pour leur fournir le service qui correspondra à leurs attentes. Quelques pistes de solutions :
• Avec l’arrivée de l’IA, pensons au tarif horaire plutôt qu’à celui au mot.
• Les supports informatiques ont évolué, pourquoi pas notre tarification?
• Qui dit marché différent, dit tarification différente. Il faut personnaliser.
• Osons le forfait.
• Ou encore, la tarification par paire de langues ou par délai de livraison.

Et puisque ni l’inflation ni la pénurie de main-d’œuvre qualifiée n’épargnent le secteur langagier, n’attendons pas pour augmenter nos tarifs!

3. Nous valons plus que l’IA!
Contrairement à ce que les clients internes ou externes pourraient imaginer, on constate que l’IA n’est pas si brillante que ça en traduction, qu’elle est loin d’être gratuite et qu’elle n’augmente la productivité que dans des cas limités. Un bon service reste l’apanage des professionnels langagiers, qui sont les seuls à comprendre et à savoir communiquer, les seuls à savoir quels outils utiliser quand et comment (y compris l’IA), et les seuls à pouvoir optimiser les budgets de traduction selon les attentes exprimées.

4. L’avenir, c’est la spécialisation!
Le traducteur généraliste est menacé par l’IA, qui génère des millions de mots traduits par minute et pourrait faire pression sur les tarifs. L’avenir de la profession passe donc par la spécialisation. Cette spécialisation, les professionnels canadiens en sont riches, après de nombreuses années passées à se perfectionner, mais nous devons envisager de commencer cette spécialisation de manière plus intense dès l’université. Rien ne vaut une deuxième spécialisation, en plus d’un diplôme en traduction.

5. Et la relève!
Le constat est criant pendant notre belle matinée : il n’y a pas assez de jeunes parmi nous! Nous devons mobiliser la relève et attirer plus de jeunes vers notre secteur. On aimerait voir plus d’inscriptions dans les programmes universitaires, et ces programmes doivent vite s’adapter à nos nouvelles réalités, c’est-à-dire faire plus de place à la révision, à la gestion de projets, à l’étude de l’IA et de la TA, ainsi qu’à la connaissance des nouveaux outils. La traduction est plus d’actualité que jamais dans notre société mondialisée, et sa valeur ajoutée ne se dément pas, ni pour le commerce ni pour l’intérêt général. En outre, les professionnels langagiers jouissent de bonnes conditions de travail et de beaucoup de flexibilité. De son côté, l’ACGL s’engage dès à présent à ouvrir ses événements à des étudiants et à créer davantage de ponts avec les universités.

6. Canada et Québec : des marchés bien positionnés
Les marchés canadien et québécois sont traditionnellement des marchés privilégiés pour la traduction, notamment grâce aux politiques linguistiques en vigueur. Le Québec est aussi l’un des rares endroits dans le monde où il y a un ordre professionnel pour les traducteurs (l’OTTIAQ). Notre savoir-faire et notre créativité linguistiques sont par ailleurs reconnus dans toute la francophonie. Enfin, nos entreprises, comme nos cabinets de traduction, n’hésitent pas à miser sur des traducteurs salariés, dont les services contribuent directement à l’augmentation de valeur et à l’amélioration de l’image de marque de leurs organisations. Nous avons donc tout en main pour faire prospérer nos professions, et nous devons maintenir cette excellence, y compris au niveau technologique.

Nous tenons à remercier Fasken pour son accueil chaleureux, ainsi que tous les commanditaires de l’ACGL.

Renato Beninatto

Nos panélistes : Renato Beninatto, Karine St-Onge, Donald Barabé et François Chartrand
Modérateur : Antoine Raimbert

Merci à nos commanditaires

L’ACGL tient à remercier ses commanditaires qui ont accepté de soutenir ses activités tout au long de l’année.

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